SYNDROME  D'APNEES  OBSTRUCTIVES DU  SOMMEIL

Auteur : H Menu

2005

1         Qu’est ce que le SAOS

1.1      DEFINITIONS

Le syndrôme d’apnée du sommeil est la survenue de plus de 5 apnées ou 10 apnées ou hypopnées par heure de sommeil et l'existence de sympômes nocturnes (le ronflement essentiellement) et peut s’y associer une somnolence diurne.

Une apnée correspond à une interruption de la respiration de plus de 10 secondes.

Celle-ci est obstructive avec poursuite des mouvements respiratoires en cas de SAOS par opposition aux apnées d’orignine centrale avec une interruption complète des mouvements respiratoires.

 

1.2      PHYSIOPATHOLOGIE

Le collapsus du pharynx survient en regard du voile du palais et/ou en arrière de la base de langue.

Normalement au cours de l'inspiration, la perméabilité du pharynx est maintenue par la contraction des muscles dilatateurs du pharynx. Le collapsus va survenir lors d'un déséquilibre entre la force générée par la contraction de ces muscles dilatateurs et la pression négative inspiratoire qui tend à collaber le pharynx.

Trois facteurs essentiels sont ainsi à l'origine de ce collapsus :

 

1.3       EPIDEMIOLOGIE

La prévalence du SAS chez les sujets d'âge moyen peut être estimée à 2 % chez les femmes et 4 % chez les hommes,

Facteurs de risque

Le SAS induit des conséquences neuropsychiques et cardiovasculaires (stimulation adrénegique nocturne et diurne provoquée par la répétition des apnées)

Les risques relatifs s'établissent en fait de la façon suivante:

* 2 fois plus d'Hypertension Artérielle (HTA)

* 3 fois plus d'Insuffisance Coronarienne.

* 4 fois plus d'AVC.

2         Diagnostic

Le diagnostic du SAS repose sur une présomption clinique.

Cependant, l'appréciation de la gravité repose pour l'instant sur un faisceau d'arguments :

2.1      Smptomes

2.1.1      RONFLEMENT

Il existe chez pratiquement tous les apnéiques. Il est sonore, constitue une plainte fréquente du conjoint et un motif de consultation. Il est produit par la vibration du voile du palais et des parties molles pharyngées.  Il est influencé par le poids, l'alcool, les myorelaxants, sédatifs ou neuroleptiques

2.1.2      HYPERSOMNOLENCE DIURNE

2.1.3      OBESITE ET AUGMENTATION DU TOUR DE COU

L'obésité est retrouvée (IMC  > 30 kg/m²) dans environ 70 % des cas mais 30 % des sujets n'ont pas de surcharge pondérale

2.1.4      Autres signes

3         Traitement

3.1       TRAITEMENTS  INSTRUMENTAUX

PRESSION POSITIVE CONTINUE PAR VOIE NASALE (PPC)

L'appareillage se compose d'un générateur de débit d'air, d'un système de tuyaux à basse résistance, d'un dispositif pour régler la pression d'air et d'un masque qui s'adapte au nez du patient

L'application d'une PPC dans les VAS empêche le collapsus du pharynx pendant le temps inspiratoire et expiratoire.

Trois types essentiels d'effets secondaires de la PPC sont rapportés chez quarante à soixante pour cent des patients suivant leur traitement : 

VENTILATION A DEUX NIVEAUX DE PRESSION  (VDNP) OU BIPAP

 

PRESSION POSITIVE AUTO PILOTEE  (AUTO PPC)

La pression nécessaire et suffisante pour supprimer l'obstruction des voies aérien nes supérieures varie selon le stade de sommeil, la prise d'alcool au repas du soir, le poids, la position corporelle, le degré d'obstruction nasale ou encore la privation de sommeil.

Ainsi, une PPC idéale devrait être capable d'ajuster le niveau de pression appliqué à toutes ces situations : c'est l'objectif de la pression positive auto-pilotée.

Les avantages potentiels de ces PPC auto-pilotées sont multiples. Elles pourraient permettre d'appliquer en permanence une pression minimale et ainsi réduire la pres sion moyenne appliquée sur la nuit.

 

AMAIGRISSEMENT DU PATIENT OBESE

EVICTION DE L'ALCOOL

EVICTION DES HYPNOTIQUES ET DES SEDATIFS

OXYGENOTHERAPIE NOCTURNE

L'oxygénothérapie isolée n'a pas fait la preuve de son intérêt pour le traitement des apnées obstructives

AGENTS PHARMACOLOGIQUES

L'apport des produits pharmacologiques reste très limité. On retiendra l'intérêt de la protryptilline (apnées nombreuses pendant le sommeil paradoxal), de l'acétazolamide (apnées induites par l'altitude ou une insuffisance cardiaque gauche), et de la médroxyprogestérone (patients obèses présentant un syndrome d'hypoventilation alvéolaire).

 

APPAREILS STOMATOLOGIQUES

Il s'agit d'un ensemble de dispositifs visant soit à propulser la mandibule en avant, soit à retenir la langue, c' est-à-dire dans tous les cas à élargir l'espace rétro-basilingual

 

3.2      TRAITEMENTS CHIRURGICAUX

3.2.1      Trachéostomie

Elle a été utilisée comme traitement du SAOS, avant même que cette entité ne soit parfaitement identifiée et définie. C'est une méthode extrême.

3.2.2      Chirurgie Nasale

Elle fait référence à toutes les interventions de désobstruction de la filière nasale.

Ce sont principalement la correction d'une déviation septale (la septoplastie), la turbinectomie et la résection de polypes, les plasties d'élargissement de la valve nasale

La chirurgie nasale peut s'envisager de deux manières différentes : soit comme un traitement curatif du SAOS, soit comme un moyen d'adaptation à la PPC.

3.2.3      UVULOPALATOPHARYNGOPLASTIE

Principe Le but de l'UPPP est d'élargir l'oropharynx en enlevant le tissu vélaire et pharyngé en excès.

Amygdalectomie, résection du tissu cellulaire au niveau des piliers antérieurs et postérieurs, résection subtotale de la luette. L’ensemble des tissus est ensuite remis en tension.

le succès semble obtenu dans 41 % des cas si l'on s'en réfère à la méta-analyse effectuée par Sher et coll regroupant les résultats de la chirurgie chez 374 patients.

Alors que les résultats subjectifs concernant le ronflement sont bons, les résultats objectifs sont tout autres avec un index de ronflement ou une intensité de ronflement non modifié par la chirurgie

Le risque est de ce fait de laisser subsister des apnées «silencieuses» du fait de la régression «subjective du ronflement et de l'hypersomnie, mais dont l'impact cardiovasculaire persiste

 

3.2.4      GLOSSECTOMIES

Ces techniques sont nées des échecs de l'UPPP. Elles relèvent toujours de la volonté d'élargir les VAS, en agrandissant l'espace rétro-basi-lingual.

Fujita fut le premier à proposer une glossectomie médiane par laser  Le principe de cette intervention est de pulvériser le tissu en excès et de créer un large sillon au milieu de la base de la langue. L'oedème postopératoire impose une trachéotomie pour une durée de 3 à 4 jours.

 Le taux de succès avoisinerait 77 %, d'après l'auteur. Mais aucune autre publication ne confirme ces données.

Une variante est proposée par Chabolle qui préconise une résection de la base de langue par voie cervicale. Elle est également réalisée sous couvert d'une trachéotomie. Elle consiste, après avoir contrôlé les deux pédicules vasculo-nerveux, à réséquer 20 à 25 cm3  de base de langue. Une UPPP et une hyo-mandibulopexie sont systématiquement associées.

 Les bons résultats avancés par l'auteur (50 à 60 % de succès) doivent être tempérés par un certain nombre d'inconvénients :

* La trachéotomie est obligatoire dans tous les cas.

* Le sacrifice des branches postérieures du XII, dénervant partiellement la langue, n'est probablement pas anodin.

* La suspension hyoïdienne à la mandibule est discutable.

3.2.5      Chirurgie maxillofaciale.

Chirurgie de phase I

Riley et coll  en 1984 décrivent une chirurgie de phase I comportant une avancée des apophyses géniennes associée à une hyoïdopexie plus ou moins une UPPP avec fixation de l'os hyoïde sur le cartilage thyroïdien.

Le taux de succès rapporté est de 61 % sur 249 patients.

Chirurgie de phase II

Il s'agit d'une ostéotomie bi-maxillaire d'avancement maximal. Elle est soit réalisée directement (cas le plus fréquent), soit précédée d'une ostéotomie sous-apicale de recul après extraction des deuxièmes molaires.

Sur 91 patients, échecs de la phase I, un succès a été constaté chez 97 % des sujets.

 

4         Implications anesthésiques

4.1      Risque opératoire

Les complications observées chez le sujet apnéique ont donné lieu à la description de nombreux cas cliniques qu'on peut classer en 2 catégories : intubation difficile et  épisodes d'obstruction sévère des VAS après administration de morphiniques et/ou de benzodiazépines. Dans la plupart des cas, le diagnostic de SAOS n'est pas connu avant l'intervention chirurgicale.

L'analyse systématique des complications opératoires chez des patients dont le diagnostic de SAOS est connu a été effectuée dans 4 études rétrospectives (1999).

Sur 135 patients admis pour cure chirurgicale de leur SAOS, 18 présentent une complication, essentiellement respiratoire : intubation difficile (n = 7 dont un décès), obstruction des VAS en postopératoire ayant nécessité une réintubation ou la mise en place d'une canule (n = 7)

Dans une autre étude après UVPP chez 101 sujets apnéiques, la présence d'une obstruction des VAS pour 11 patients nécessite aussi des mesures spécifiques : réintubation, poursuite de la ventilation, trachéotomie . Un sujet décède par détresse respiratoire post-extubation.

Dans une série de 182 patients admis pour cure chirurgicale de leur SAOS, Riley et coll.observent un taux élevé d'intubation difficile et de poussées hypertensives postopératoires.

4.2      Intubation

L'intubation devra être systématiquement considérée comme délicate. Les caractéristiques morphologiques décrites chez les sujets SAOS sont identiques aux critères d'intubation difficile de nombreuses études :

·        cou court

·        retromandibulie

·        palais ogival

·        protrusion des dents

·        hypertrophie relative de la base de langue

Il est désormais admis que le SAOS est associé à une fréquence élevée de survenue d'intubation difficile (ID) : 44 % pour Gentil et coll., 22 % pour Riley

Dans une série de 33 patients admis pour cure chirurgicale de leur SAOS, non obèses, un taux d'ID de 27 % a été observé[ Payen JF, Richard M, Gariod T, et al. Intubation difficile dans le syndrome d'apnées du sommeil.Ann Fr Anesth Réanim, 1997;16:R8014].

La moitié des patients ayant une ID a un score de Mallampati 1-2, et/ou une ouverture de bouche normale.

D'autres auteurs ont observé un allongement de la distance mandibulo-hyoïdienne chez les sujets apnéiques.

 

En pratique

 un sujet atteint de SAOS doit être considéré comme à risque d'ID. Il est impératif d'avoir prévu un recours à l'intubation par fibroscopie.

 

4.3      OBSTRUCTION POSTOPERATOIRE DES VAS

Il apparaît évident que la période postopératoire est la phase la plus critique après une anesthésie générale chez un patient atteint de SAOS. De nombreux cas cliniques ont été rapportés, mais la transposition de ces observations en règle de bonne pratique n'est pas aisée.

Il n’existe pas de critère discrimant reconnu

 

L'obstruction postopératoire des VAS, relève de deux mécanismes principaux :

·        les effets de l'anesthésie sur le tonus des muscles des VAS et le contrôle ventilatoire sont bien connus chez le sujet sain. Il est donc évident que l'anesthésie ou plutôt l'état de sédation pharmacologique ne fera que reproduire voire amplifier les effets du sommeil sur les VAS pour le sujet apnéique. La particularité de la situation vient du fait que l'effet pharmacologique ne permet plus au patient un réveil protecteur, d'où la sévérité de l'obstruction ;

·        la survenue des troubles du sommeil en postopératoire et leur retentissement sur la mécanique des VAS est un domaine d'étude plus récent. Il a été ainsi rapporté des épisodes hypoxémiques par obstruction des VAS au cours de la 1ère  nuit postopératoire chez le sujet sain recevant de la morphine
De même, chez le ronfleur, des épisodes de désaturation (SpO < 90 %) sont observés au cours de la 1ère nuit postopératoire  même si l'anesthésie ne modifie pas le sommeil postopératoire.

4.4      Prise en charge post opératoire

En pratique, la prise en charge postopératoire de ces patients soulève 3 points particuliers :